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27 juin 2008

Flâneries parisiennes 10

Dans la couronne parisienne, on pouvait trouver des petits coins de paradis...


La Cité du Progrès

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Il est quelque part en une cité de la banlieue qui fut rouge, non loin des rails transiliens qui transpercent cette friche industrielle, une petite rue moribonde, entourée de barres rouges au pied desquelles s’amoncellent, chaque jour, des monceaux d’ordures ménagères et en tout genre, qui devait être autrefois bien agréable. Cette rue porte le nom d’une ambition futuriste positive, La Cité du Progrès, aujourd’hui censuré, mis en chantier et en l’état latent de destruction. Dans cette rue triste et blafarde, il ne s’y trouve guère que les vestiges de maisons ouvrières, toutes construites sur le même modèle, s’ouvrant sur de petits jardins sentant bon le bassin parisien et qui devaient jadis, marquer les différences de caractère de chaque habitant. Mais depuis quelques années, ceux qui demeuraient en ces lieux, disparaissent un à un et on laisse ces maisons vides, calfeutrant leurs ouvertures deCit__du_Progr_s_2_html_1132762b parpaings cimentés entre eux. Ces ruines de l’ère ouvrière meurent dans un silence bétonné, murées dans un mutisme désespéré, tandis que les jardins sont envahis par les ronces, les herbes folles et les déchets plastiques et organiques de passants peu scrupuleux. Cependant, au bout de cette impasse offerte aux voitures, une dernière bâtisse collée à sa muette voisine, résiste. J’aperçois de temps à autre, une petite dame vêtue de sa sempiternelle blouse d’un bleu insipide sur lequel sont imprimées de petites fleurs incolores et délavées par des années de lavage. Son visage ridé comme une pomme blette, au-dessus duquel débordent quelques cheveux grisonnants et permanentés, dépasse à peine du rebord de la fenêtre qu’elle a entrouverte pour replier des volets de bois verts et vermoulus. La joie l’a quittée comme elle l’a fait pour cette rue entière que j’imagine vivante il y a encore une quinzaine d’années. Les autorités municipales, propriétaires de cette euphorie architecturale éteinte, donnent l’impression d’attendre patiemment la mort de cette brave dame, pour murer ce dernier organe de pierre vivant et finalement tout raser. Quelques lofts pousseront Cit__du_Progr_s_3_html_4db55a07peut-être sur ce terreau ouvrier. Mon crayon à la mine de charbon glisse sur une feuille de papier acide, pour rendre sans doute un dernier hommage à cette époque glorieuse et trentenaire qu’a connue cette ville alors manufacturière. Qu’il soit fait ainsi. Néanmoins, s’il faut goudronner des jardins et ébouler des pavillons, rasons aussi ces tours et ces barres hideuses et inhumaines, plantées au quatre coins de l’Ile-de-France, qui sont des barrages infranchissables contre le métissage social, des favelas en briques et béton armé où les révoltes pour la vie éclatent irrémédiablement. Rebâtissons, vivons dans l’utopie d’un monde meilleur et concrétisons-la en construisant de nouvelles et ambitieuses cités du progrès.

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